Des petits arrangements entre amis, vraiment ?

Tous les verdicts vont donc tomber ce dimanche, suspense et rumeurs garantis, rumeurs d'arrangements notamment. Mais au-delà de tous ces fantasmes (avérés ou non) de petits arrangements entre certains clubs, il y aussi toutes les bonnes raison pour lesquelles certains matches créent parfois de véritables déchirements chez certains joueurs ou certains clubs.

Derrière les grandes formules (jouer pour son blason, jouer pour sa prime), derrière les grands clichés (les matches truqués et les enveloppes sous la table), il y a aussi des enjeux humains. Au Standard à Charleroi et à Mouscron, des joueurs se connaissent, le Standard a les clés en main, pas facile même à distance d’envoyer un pote en PO2 ou en PO3.

"J'ai connu ça de près une année entre Mons et Mouscron", se souvient Alex Teklak. "J'avais beaucoup de connaissances à l'Albert. On y pense avant. On y pense après. Mais on n'y pense absolument pas pendant. Parce qu'on défend un blason, parce qu'à cette époque-là on avait aussi une forte identité par rapport à notre club. On évite soigneusement de s'appeler la semaine qui précède ce genre de rencontre. Ce n'est pas quelque chose qui est dans les codes".

Benjamin Nicaise qui a porté les couleurs de Mons, du Standard et du Lierse, ne dit pas autre chose. "Quand je montais sur un terrain c'était pour gagner le match. Le fait d'avoir un pote à 300 kilomètres, ça ne me parlait pas. Je gagnais ma vie et les primes de match faisaient partie de mon salaire variable", tranche Nicaise.
Il y aussi les enjeux régionaux, les trois clubs wallons vont se déchirer à distance, alors que les derbys remplissent les stades mutuels et que ces équipes partagent un univers culturel commun.

"Un certain quota de clubs wallons, c'est important pour l'équilibre du championnat. Mais ce n'est pas au Sporting de Charleroi de rendre un service à Mouscron", précise Teklak. "Toutefois, le contexte est très particulier. On peut imaginer qu'une équipe se retrouve en play-offs 2 et l'autre en play-offs 3. Ce serait le pire scénario ... pour les deux."

Apparaissent alors des solidarités naturelles, qui se traduisent parfois par des doubles primes de motivation ou au contraire une incitation (venue d’en haut) de lever le pied, car c’est mieux pour les recettes.

"Quel est le problème à ce qu'un manager motive ses joueurs pour une victoire et que cette victoire puisse découler pour le club d'un avantage financier ?", s'interroge Nicaise. "C'est comme le système des mallettes en Espagne où ils donnent une sur-prime en cas de victoire. Quel est le problème ? Là, on paie pour une victoire, on ne paie pas pour une défaite." Et pourtant, les primes pour motiver autrui sont aujourd’hui interdites.

"Personnellement, je ne l'ai pas connu. J'ai toujours vécu dans des vestiaires suffisamment fort pour ne pas accepter ce genre de chose", assure Teklak. "Parfois, la préparation est un peu plus légère en semaine. On sent que l'objectif premier n'est pas nécessairement d'aller engranger les points. Oui, cela peut arriver. Mais en général, et c'est peut-être paradoxal, les matches qui n'ont plus d'importance, sont des bons matches parce que les équipes se lâchent".

Il y a enfin la pression des supporters : à Charleroi certains fans disent préférer les PO2 à un éventuel coup de pouce du Standard, à Sclessin aussi les fans carolos sont maudits. Et cela percole jusqu’au vestiaire.

"Quand tu portes tes couleurs et que tes supporters te soutiennent, tu es obligé de te fondre dans l'histoire du club", souligne Nicaise. "Vous pouvez demander à Thuram, Faty, les joueurs français du Standard, s'ils ne se sentent pas concernés par ce qui se passe dans la ville et par l'engouement qu'il y a à Liège".
"Je pense que les joueurs sont tout à fait conscients de cela. Surtout quand on joue dans des clubs bouillants", embraie Teklak. "Regardez ce qu'il s'est passé avec Mata en début de saison (une photo où il porte le maillot du Standard a été postée sur les réseaux sociaux). Regardez, l'influence que cela a eu pour lui, pour son début de saison et pour sa confiance", appuie l'ancien défenseur.

La Ligue pro dépêchera ce dimanche des contrôleurs pour débusquer tout comportement suspect. Et si tout cela finalement n’était qu’un serpent de mer ? "Franchement, en huit ans en Belgique, il y a peut-être un ou deux matches ou je me suis posé des questions. Après, je ne détiens pas la vérité et je suis peut-être un grand naïf", conclut Nicaise.

nicaise ; un naïf . Il nous prend pour des cons oui